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“Association de sauvegarde du patrimoine architectural du XXe siècle au Maroc”
Casamémoire : Propositions de l’association

La mise en place d’un plan patrimoine

La dégradation, la disparition du patrimoine architectural et urbain moderne de Casablanca, reconnu et référencé scientifiquement, sont ressenties comme une agression par les Casablancais d’une part (démolitions : Théâtre Municipal, Arènes, cinéma Vox, villas Mokri, Benazeraf, etc., altérations des quartiers et ensembles Gautier, Racine, boulevards d’Anfa, Moulay Youssef, Massira Khadra), et comme un gaspillage de richesses par les visiteurs étrangers d’autre part.


Il est nécessaire de mettre en place, en urgence, une politique de protection efficace et ambitieuse.


La vision du développement futur de la ville ne peut faire l’économie d’un vrai plan patrimoine considéré comme un des grands travaux prioritaires à mettre en œuvre.


Ce plan se divise en quatre volets principaux.

I. TECHNIQUE

Dans l’immédiat et dans l’attente de l’application des lois de protection :

  • indiquer sur les fiches de renseignement délivrées par l’Agence Urbaine les réserves concernant le patrimoine ;
  • instaurer une sorte de moratoire sur les nouvelles autorisations de construire dans le centre ville ;
  • surveiller les autorisations de démolir. La législation actuelle de protection type «  monument historique » n’est pas adaptée au patrimoine casablancais : les propositions de classement de bâtiments isolés ne peuvent répondre à la préservation de ceux-ci. Au contraire, le classement est perçu comme une pénalisation par les investisseurs qui, faute d’accompagnement, n’ont pas d’autre alternative que de laisser se dégrader leur propriété jusqu’à disparition.
  • Création de zones protégées : permettant des aménagements plus souples, voire « ZPPAUP » : zone de protection du patrimoine architectural urbain et paysager ( législation française).
  • Montage du dossier d’obtention de classement de la ville au patrimoine mondial du XXe siècle auprès de l’UNESCO. Casablanca, selon les experts internationaux, réunit tous les critères exigés.
  • Mesures fiscales : encourageant et aidant les initiatives d’entretien et de restauration.
  • Dérogations et facilités accordées : transferts de C.O.S.
  • Identification, inventaire, enquêtes.
  • Etablissement de cahiers des charges : assistance à des réhabilitations cohérentes et obligatoires.
  • Etudes du prochain schéma directeur en cours : intégrer comme priorité le thème de la protection du patrimoine, revenir sur le « rapport justificatif » de celui élaboré par le cabinet Pinseau en 1986 qui insiste sur la qualité de l’urbanisme du centre ville : recommandation sans suite ces vingt dernières années.
  • Classer, réorganiser les archives de la ville concernant les dossiers de permis de construire depuis 1915, et les mettre à la disposition des historiens, des chercheurs, des étudiants,… Pour l’étude et l’exécution de ce volet, l’agence urbaine est l’outil existant le mieux adapté. Sa compétence peut être renforcée par des formations spécifiques de son personnel.


II. MISE EN VALEUR
L’application des mesures de protection est inefficace si elle n’est pas accompagnée de la mise en valeur du patrimoine et de son environnement, en premier lieu la requalification de l’espace public.

  • Résolution des problèmes de circulation automobile, source de pollution et d’encombrements.
  • Transports publics : l’option « tramway » qui semble se concrétiser est la plus adaptée.
  • Création de rues piétonnes.
  • Création et entretien d’espaces verts, parcs, squares, arbres d’alignement, protection des jardins privés.
  • Eclairage public : entretien, choix cohérent et vérifié, mise en lumière de bâtiments et d’ensembles.
  • Assainissement, nettoyage, ramassage des ordures.
  • Régulation des enseignes et des espaces publicitaires.
  • Signalisation cohérente et complète.


III. SENSIBILISATION
Généraliser l’initiation au patrimoine de leur ville auprès des écoliers, des étudiants et des habitants :

  • Conférences, expositions, publications, visites guidées et films documentaires.
  • Donner à la ville une image attirante pour le tourisme culturel, déjà existant : ville classée au patrimoine du XXe siècle.
  • Créer des labels encourageant les initiatives privées.


IV. COMMUNICATION
Mener et exposer une politique dynamique auprès des acteurs privés et publics expliquant l’intérêt à long terme de l’investissement dans la réhabilitation et la mise en valeur du patrimoine.

  • PUBLICS : impliquer toutes les institutions, inciter les divers ministères à répertorier, entretenir, faire connaître leur patrimoine immobilier (éducation nationale, transports, armée, santé, etc.).
  • PRIVES : démontrer l’adéquation entre la vision futuriste représentée par le patrimoine du XXe siècle et les projets actuels de développement. Mettre en lumière l’implication des grands groupes internationaux dans l’environnement, la culture et ses retombées à long terme en termes d’image.
  • Donner l’exemple : investir des bâtiments appartenant à la ville en attente d’affectation (église du Sacré Cœur, abattoirs, aquarium, …).
  • Ouvrir au public : journées portes ouvertes, visites guidées.


Tous les volets esquissés d’un tel plan patrimoine sont indissociables les uns des autres. Pour la réussite de ce projet, il est nécessaire d’assurer une parfaite coordination des interventions, et éventuellement de créer un organisme centralisateur des études et des décisions, relayé au niveau communal, piloté par la Municipalité et la Wilaya, dans lequel on devra trouver comme acteurs principaux : l’Agence Urbaine, le ministère de la Culture, le ministère du Tourisme et la société civile représentée par des associations. Son rôle doit être légitimé et effectif. Il doit être considéré comme un des outils principaux participant au développement futur de la ville, sans limites de territoire ou d’activités.


Bibliographie :
Casablanca – Mythes et figures d’une aventure urbaine, J.-L. Cohen et M. Eleb, éd. Hazan, 1998.
Architecture et patrimoine du XXe siècle en France, B. Toulier, éd. Du patrimoine, 1999.


Demande d’inscription au patrimoine mondiale de l’Humanité auprès de l’UNESCO
https://whc.unesco.org/fr/apropos/